Burkina Faso : le terrorisme, une menace sur la biodiversité à l’Est

La présence des groupes armés terroristes dans les forêts du Burkina Faso impacte sur les efforts consentis par les autorités et les populations locales pour la protection des biodiversités. À l’Est du Burkina, la forêt du Parc W est un cas précis. 

✍️ Frank Pougbila 

Depuis 2018, cette grande forêt est infiltrée par des groupes armés terroristes. International Crisis Group fait savoir, dans son rapport 310 de janvier 2023,que ce sont les Katibas Ansaroul Islam et Serma qui ont occupé le plus grand Parc national du pays des Hommes intègres.

Le groupe d’experts confie que les terroristes ont d’abord recruté dans les rangs des bandits qui opéraient dans la forêt pour gonfler leurs rangs. Puis, dans les villages près du Parc W, les groupes armés terroristes promettent aux villageois de les aider à prendre le contrôle des forêts. Avec cette promesse, ils arrivent à recruter des combattants.

Ils profitent des conflits fonciers pour avoir des alliés. Pour obtenir des informations, ils laissent libre accès aux éleveurs aux abondantes prairies humides et en retour, ils bénéficient des renseignements et des ravitaillements.

Cette présence massive des terroristes dans les forêts est une menace pour les biodiversités. Crisis Group souligne que les terroristes ont d’abord saboté toutes les infrastructures comme des tours de guet, des forages, des panneaux solaires, des points d’eau et des antennes de réseaux de téléphonie mobile.

La forêt, source de revenus des terroristes

« Le Parc W est une importante source de revenus pour les insurgés. Les jihadistes utilisent tout d’abord l’important réseau de pistes et de rivières du parc pour faire passer clandestinement de la nourriture, du carburant, des armes et des motos à travers les trois frontières.

 Ils profitent ensuite de sa superficie pour stocker le bétail qu’ils ont volé ou accumulé grâce à la zakat, avant de le vendre parfois sur les marchés voisins. Enfin, ils prélèvent des taxes sur les orpailleurs dans la région et utilisent des intermédiaires, dont certains pourraient être basés à Niamey, pour négocier la revente de l’or», peut-on lire dans le rapport.

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Le tourisme a pris un coup avec la menace terroriste. Uniquement la partie béninoise est accessible. Aussi, le départ des forestiers a rendu les forêts vulnérables et le braconnage a repris. «Une prise de vue aérienne dans le cadre d’une enquête réalisée en 2021 a dénombré environ 63 000 têtes de bétail à l’intérieur du Parc W. Elle a également observé que la population d’éléphants était tombée à 4 056 contre 8 938 en 2015, date de l’enquête précédente.

 On assiste donc à une recrudescence du braconnage. Un autre indicateur est la baisse des prix de la viande de brousse et des autres produits de la faune sauvage sur les marchés ruraux»,note ICG.

Risque de disparition des biodiversités

 De même, des agriculteurs qui ont la bénédiction des terroristes ont profité pour défricher de grands espaces au sein et aux abords du parc. Et les orpailleurs artisanaux ont pris d’assaut le parc. Ils exploitent en quantité dans les localités bien souvent avec des produits chimiques.

Il y a plusieurs mines d’or artisanales près du parc W. Des villages qui ont des mines sont Tchiapagri (à Tansarga), Bayantori (à Tambaga), Mardaga, Boungou, Kankandi, Bamouanti et Boujouani (dans la commune de Partiaga), et Koriombo et Douptchari (à Diapaga).

« Le Parc W risque donc de subir un sort similaire à celui de la forêt de la Sambisa, une réserve de gibier autrefois florissante dans le nord-est du Nigéria, où l’insurrection islamiste de Boko Haram a établi sa base au milieu des années 2010.

Au fil des années, la Sambisa est devenue une plaque tournante de contrebande pour les insurgés et une forteresse imprenable pour les forces de sécurité, qui ont tenté de déloger le groupe à l’aide de bombardements aériens. Aujourd’hui, la forêt est complètement décimée et sa faune et sa flore rares ont disparu», alerte les experts de Crisis Group.

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📸GEO

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