Pisciculture : «  il est possible d’élever du poissons comme de la volaille », Thomas Bouda

La pisciculture est l’élevage du poisson. Une activité qui intéresse de plus en plus les Burkinabè. Pour en savoir plus sur cette pratique, Info Nature est allée rencontrer Thomas Bouda. Il est le Directeur technique chargé de la planification et de la formation en production animalière dans le Cabinet Tiligré Agro Sarl, basé à Ouagadougou.

De Frank Pougbila

Le 25 juin 2021. Il est au 15 heures 16 minutes. Le Cabinet Tiligré Agro Sarl, situé à Karpala, dans l’arrondissement 11 accueille une équipe de Info Nature. Dès la porte, des cultures hors sol se présentent.   Du fourrage vert hydroponique, de la fraise et biens d’autres espèces sont plantées dans la cour.

En avançant un peu vers l’entrée du Cabinet, deux bassins sont implantés. C’est un lieu réservé aux séances pratiques lors des formations en pisciculture. Thomas Bouda, expert en production animalière assure habituellement les formations en élevage du poisson au sein de  Tiligré Agro Sarl.

Il sort une canne à pêche et l’introduit dans le bassin. En le retirant, des poissons silures visiblement gros s’en suivent. «  L’on peut gagner sa vie en élevage du poisson d’où notre engagement à vulgariser les techniques  pour donner des compétences et moyens aux producteurs »,  dit-il, en replongeant les poissons dans le bassin.

C’est un business très rentable. Mais les difficultés au Burkina Faso sont énormes. Le minimum à réunir pour faire la pisciculture est d’avoir l’eau et les infrastructures comme les bassins ou les étangs. En milieu urbain, ce qui est un peu limitant, « c’est l’eau ». « Dans l’eau servie par l’ONEA, il y a du chlore. Il faut donc filtré le chlore. Il est à noter aussi la cherté des factures d’eau. L’idéal est l’eau de forage », confie le technicien.

Il se dirige vers un autre bassin. Cette fois-ci, ce sont des tilapias qu’il fait sortir. Il les place sur une balance et prit le poids des poissons. « Au Burkina, il y a plus d’une centaine d’espèces dans les barrages mais ce n’est pas toutes les espèces qui sont conseillées en pisciculture. Les silures et les tilapias sont utilisés plus dans la production dans notre pays », informe le formateur.

Les aliments

L’élevage extensif des poissons est fait dans les étangs, dans les barrages. Celui intensive se pratique dans des terrains vastes. « C’est ce qui est vulgarisé à Tiligré agro Sarl. Des gens prennent des hectares où ils mettent des forages pour élever des poissons », explique-t-il, en saisissant un plat en plastique.

Il enfouit la main dans la boite et ressort des aliments qu’il jette dans l’eau. Des poissons se retrouvent à la surface de l’eau et font la concurrence pour se tailler la grosse part de la nourriture.

« La question des aliments est la grande difficulté de la pisciculture au Burkina. Au niveau local, des personnes font des aliments. Néanmoins, en termes de qualité, ce qui vient de l’extérieur est meilleur. Ce qui pousse les producteurs à acheter ce qui vient de l’etranger mais qui est cher », soutient M. Bouda.

Rôle de l’Etat 

Sur le bassin sont fixés des appareils. Il s’agit des pompes à oxygène qui vrombissent. « Ces machines sont importées. De même, la production intensive demande que l’on ait suffisamment de l’énergie », insiste le formateur.

L’autre difficulté, c’est la fourniture en alevin de silure. Il indique que si l’on a plus de  30 mille alevins, ils peuvent être achetés à l’espace d’une semaine, car la demande est grande et l’offre est absente.

En tant que technicien, une solution pour la production devrait être trouvée. La solution, dira-t-il, est plus financière car la production des aliments demande de gros moyens. « Il facile d’élever du poisson que de créer l’aliment du poisson.

Les gens veulent le gain rapide. Pourtant, il faut investir des millions et attendre plusieurs années avant de gagner. Les acteurs doivent s’organiser pour résoudre la question d’alevins et d’aliments », conseille le directeur technique.

L’Etat intervenait dans le centre piscicole de Bagré avec une usine de production d’aliments. « Elle n’est plus fonctionnelle. Et j’ignore la raison », se désole le technicien, fixant force son bassin.

Malgré les difficultés, Thomas Bouda se réjouit, car plusieurs personnes sont intéressées par la pisciculture au Burkina. La pêche apporte énormément à l’économie nationale et il est important de faire la transition de la pêche à la pisciculture.

Du poisson comme la volaille

« Le besoin de consommation est plus de 100 mille tonnes par an au Burkina. En 2018, le Burkina était à 27 mille tonnes de production nationale y compris la pêche. La production de la pisciculture représente seulement 2% », communique-t-il.

En fonction de la souche, rassure le formateur, dans un élevage semi-extensif, en six mois, un alevin peut devenir un poisson ayant 300 grammes ou plus. Le tilapia au stade de grossissement (40 à 50 grammes)  peut être un poisson mangeable dans trois ou quatre mois maximum.

Il exhorte ceux qui aspirent à se lancer à venir se faire former, car la formation est à la fois pratique et théorique à Tiligré Agro Sarl. Le souhait est que la pisciculture puisse devenir comme de la volaille dans 10 ans.

« Il est possible d’élever du poisson comme de la volaille », foi de Thomas. Il demande  que chaque ferme qui a un château d’eau ait un lieu de production de poissons. Pour lui, il faut aller vers une production intégrée, car l’évacuation de l’eau est du fertilisant pour les sols.

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