Agroécologie : qu’est-ce que c’est ?
Au-delà des opportunités de l’agroécologie, la définition que l’on donne au concept varié selon les époques. Nous faisons la synthèse de plusieurs études pour mettre en lumière certaines conceptualisations de l’agroécologie.
Synthèse de Frank Pougbila
Les défis de l’agriculture sont énormes de nos jours. Nourrir une population croissante ,lutter contre la pauvreté et les inégalités et assurer une gestion durable des ressources naturelles et de l’envivonnement. La solution que propose plusieurs acteurs reste l’agroécologie.
Selon Grain de Sel, le terme n’est pas nouveau puisqu’il apparaît pour la première fois dans la littérature scientifique dans les années 1930. Néanmoins, sa croissance et usage courant est récent. Dans la presse comme dans les études scientifiques, les publications se multiplient. Les intérêts environnementaux mais aussi sociaux et économiques de ce mode de production agricole sont mis en exergue.
Des associations, coopératives s’intéressent à la pratique. Des projets et programmes sont lancés dans le domaine agroécologique. Des Etats s’intéressent à la pratique dans leur politique agricole. Le Burkina ne reste pas en marge à travers son ministère en charge de l’Agriculture.
Des recherches montrent qu’en Afrique de l’Ouest, les pratiques dites « agroécologiques », comme le zaï ou l’usage d’arbres, sont loin d’être nouvelles, mais intéressent toujours les producteurs.
Grain de Sel, dans une étude, souligne que plusieurs organisations de producteurs en particulier développent des dispositifs de formation et des activités de promotion et de sensibilisation sur des pratiques agroécologiques.
Au niveau régional, «la Banque mondiale et le Fonds pour l’environnement mondial (FEM) se sont engagés à consacrer un milliard de dollars à des projets dans douze pays, visant à mettre en œuvre des approches intégrées de gestion durable des terres, de l’eau et des forêts et des actions liées à la prévention des risques et à l’adaptation aux changements climatiques».
Définition
La grande question reste : quelle(s) définition(s) les acteurs donnent-ils de l’agroécologie et quelles représentations du développement agricole ces définitions laissent-elles entrevoir ?
L’agroécologie est une science, des pratiques agricoles et un mouvement social. L’agroécologie est née dans les années 30 comme une science qui portait ses analyses sur la conduite de la parcelle.
Elle se définit comme l’application de l’écologie en agriculture et porte son analyse sur les différentes composantes (plantes, animaux, sols, climat) et leurs interactions au sein d’un agro-écosystème (un écosystème aménagé par l’homme). Elle est associée à des travaux sur la protection des cultures, la gestion des maladies et ravageurs, la biologie du sol.
Une définition donnée par la revue Grain de Sel de l’inter-réseaux développement rural.
Depuis les années 80, l’agroécologie est vue comme une discipline scientifique à part entière avec son cadre conceptuel et sa méthodologie. Elle consiste à étudier par une approche holistique les écosystèmes agricoles en intégrant des dimensions sociales, environnementales et économiques.
Une progression de définition conceptuelle poussera dans les années 2000, certains experts à s’intéresser plus largement aux liens entre producteurs, consommateurs, territoire,société, ressources naturelles et production agricole. Choses qui ont poussé l’agroécologie a embrassé alors une nouvelle dimension, qui est celle du système alimentaire.
Selon d’autres études, l’agroécologie est également devenue un mouvement social, principalement via l’essor de l’agroécologie en Amérique Latine et plus particulièrement au Brésil, à partir des années 70. Un mouvement d’agriculteurs et d’ONG se développe en opposition à l’agriculture industrielle capitaliste.
Cinq grands principes
En ce qui concerne les pratiques agricoles, l’agroécologie se fixe comme unité d’analyse de base l’agro-écosystème. Le point de référence est la compréhension de la nature afin de l’imiter.
A lire Grain de Sel, les principes sont notamment le recyclage de la biomasse et l’équilibre du flux et de la disponibilité de nutriments; la sauvegarde de conditions du sol favorables pour la croissance des plantes (à travers le renforcement de la matière organique des sols et de l’activité biotique des sols).
Aussi, la minimisation des pertes de radiation solaire, air, eau et nutriments (grâce à la gestion de microclimats, à la collecte de l’eau et à la couverture du sol), le renforcement de la diversification génétique et des espèces de l’agro-écosystème dans le temps et dans l’espace.
En dernière position, il y a le renforcement des interactions biologiques parmi les composants de l’agro-biodiversité.
En Afrique, l’agroécologie se développe autour d’approches portées par des mouvements tels que Yélémani, le Collectif citoyens pour l’Agroécologie, CNABio, Autre Terre qui mettent en avant la souveraineté alimentaire, la biodiversité, la défense des semences locales et les pratiques de conservation au Burkina Faso.
Une série de concepts plus ou moins proches de l’agroécologie est utilisée.
C’est le cas de l’agriculture « conventionnelle » ou communément appelée « agriculture industrielle ». Grain de Sel note que c’est l’agriculture au sens large (comprenant l’élevage) pratiquée principalement dans les pays industriels et les pays émergents depuis la « Révolution verte ».
Ces agricultures sont caractérisées par une standardisation des facteurs de production, l’emploi de variétés à haut rendement, l’utilisation intensive d’intrants chimiques, le recours à l’irrigation, à la moto-mécanisation et généralement au crédit.
L’agriculture biologique est au-delà du refus de l’usage des engrais chimiques des pesticides de synthèse et des OGM pour les cultures et des farines animales, des acides aminés de synthèse et du gavage en élevage. Elle est fondée sur le respect de l’activité biologique de la nature et en particulier de ses cycles biogéochimiques.
L’agriculture de conservation est un terme générique qui rassemble les techniques agricoles protégeant le sol de l’érosion et de toutes les formes de dégradation. Trois principes en résultent : le recours à des rotations de cultures et des couverts végétaux, la réduction du travail du sol jusqu’à pratiquer le « semis direct », et la restitution au sol des résidus des cultures.
L’agriculture écologiquement intensive est fondée sur l’idée que les mécanismes naturels, ceux qui sont décrits par l’écologie, peuvent être amplifiés jusqu’à devenir presque exclusifs (ou dominants) en termes de pratiques agricoles.
Le concept rejoint le terme, plus ancien, de « révolution doublement verte » destiné à inciter la recherche à investir dans la définition de techniques agricoles et d’élevage à haut rendement, tout en respectant l’environnement.