Catastrophe naturelle : comment expliquer les différences des impacts de séisme

Les premiers scientifiques à s’être intéressés à l’environnement générateur de risque sont les spécialistes des sciences de la terre ou du climat. Leurs travaux ont permis de mieux comprendre les processus physiques impliqués dans le déroulement des catastrophes naturelles.

Les recherches qui continuent à être développées dans ce domaine sont essentielles, mais elles ne permettent pas à elles-seules de saisir pourquoi certaines régions du monde sont plus meurtries que d’autres par les catastrophes naturelles.

Revenons sur l’année 2003. L’Algérie est frappée le 21 mai par le séisme de Boumerdès de magnitude 6,7 faisant 2 300 morts, 10 200 blessés et 180 000 sans abris. Quelques jours plus tard, le 30 mai, la province de Honshu au Japon, subit également un séisme de magnitude 7, ne faisant pas de morts, seulement quelques dégâts mineurs sur le bâti et environ une centaine de blessés.

Le 26 décembre, par contre, le séisme de Bams de magnitude 6,5 frappe le Sud Est de l’Iran, faisant 35 000 morts, 30 000 blessés et détruisant la quasi totalité de la ville.

Comment expliquer de telles différences entre les impacts de séismes comparables en terme de magnitude ?

Pour le comprendre, il est nécessaire de prendre en compte d’autres facteurs explicatifs, notamment humains.

En 1755 déjà, à la suite du séisme qui détruit la grande capitale européenne qu’était Lisbonne, faisant environ 60 000 morts, les échanges entre Rousseau et Voltaire posent la question de la responsabilité sociale dans les catastrophes naturelles.

Voltaire défend une vision naturaliste de l’événement et le voit comme un hasard malheureux. Rousseau y oppose une tout autre vision, relevant que Lisbonne est construite sur une zone connue pour sa sismicité, et que son développement impliquait la mise en danger de la très forte population qui s’y concentrait. La responsabilité sociale de la catastrophe ne fait pour lui aucun doute (Bouhdida, 2014).

Ce débat annonce une grande évolution dans la manière de penser les liens entre risque et société. Avec le développement en parallèle de la société industrielle, on entre alors dans ce que le sociologue allemand Ulrich Beck appellera « la société du risque ».

Les risques contemporains ne viennent plus seulement de l’extérieur comme sont généralement pensées les catastrophes naturelles, mais ils sont également produits par la société au travers de ses activités industrielles et de l’usage qui est fait des progrès technologiques.

Dans ce contexte, comment appréhender la complexité de l’environnement définit comme un risque, comment en définir la dimension sociale ? L’angle d’approche privilégié a été l’étude de la vulnérabilité. Cette notion est définie par Wisner et al comme la probabilité de subir une blessure voire la mort, la détérioration ou la perte des biens de subsistance .

Cette probabilité dépend de multiples facteurs, que les chercheurs s’emploient à définir et à évaluer. Réduire les risques doit donc aussi passer par une limitation de la vulnérabilité des sociétés et leurs biens et de leurs activités.

Mais réduire la vulnérabilité suppose d’en comprendre les mécanismes. Or « les catastrophes sont de véritables révélateurs de vulnérabilités humaines et territoriales au sein des communautés et sociétés frappées ».

C’est donc à partir des catastrophes naturelles elles-mêmes que les chercheurs essaient de mieux comprendre ce qu’est la vulnérabilité, comment elle s’exprime, pour tenter de la réduire. Les travaux dans ce domaine ont ainsi permis de faire émerger certains facteurs spécifiques.

La pauvreté constitue un facteur majeur lorsqu’on s’intéresse à la vulnérabilité à l’échelle mondiale : les populations les plus pauvres sont aussi celles qui subissent le plus durement les phénomènes naturels.

Mais certains événements récents, comme le cyclone Katrina aux États-Unis en 2005 ou le séisme de Fukushima au Japon en 2011, mettent en évidence que la pauvreté n’est pas le seul facteur en jeu.

D’autres causes peuvent aggraver, ou au contraire réduire, la vulnérabilité des sociétés et des territoires. On peut citer par exemple les facteurs organisationnels ou politiques : la société est-elle préparée à subir de tels événements, les institutions savent-elles réagir à temps pour limiter les impacts ?

Les recherches récentes montre que face aux crues, la mobilité est un facteur de vulnérabilité particulièrement important. Les personnes à mobilité réduite (personnes âgées, enfants en bas âges, personnes handicapées) présentent une vulnérabilité plus importante que les autres.

Mais à cette catégorie de vulnérabilité largement identifiée par la recherche, des études ont montré que les automobilistes sont également très vulnérables notamment face aux crues rapides qui caractérise notamment la zone Méditerranéenne.

En effet, ces phénomènes surprennent souvent les individus dans leurs déplacements quotidiens et les voitures sont très facilement emportées par les courants violents . Ainsi, en Europe, la moitié des victimes qui perdent la vie lors de crues rapides sont des automobilistes.

La catastrophe naturelle est donc le résultat de la conjugaison sur un même espace et dans un temps donné entre un phénomène physique (climatique, hydrologique, géophysique) et une société caractérisée par une vulnérabilité plus ou moins importante face à ce phénomène.

Comprendre ce qui se joue lorsque l’environnement devient un risque suppose donc d’appréhender les multiples dimensions des phénomènes complexes à la fois physiques et sociaux qui se déroulent sur les lieux et dans le temps de l’événement.

Source : encyclopédie de l’environnement

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