Agriculture : la 2e édition de l’initiative « De la graine à la table » se tient au 21 au 22 février 2025

Le comité d’organisation de la 2e édition l’initiative « De la graine à la table » a donné les couleurs de l’évènement qui se tient du 21 et 22 février 2025 à Lombila. Une initiative qui vise à valoriser les semences paysannes depuis leur production jusqu’à la préparation de plats issus de différentes spéculations de ces semences. L’information a été portée à la presse le jeudi 6 février 2025 à Ouagadougou.

De Emmanuel GOUBA

Comment redonner à la semence paysanne, la place qui lui revient dans le système agricole burkinabé, c’est tout l’enjeu de l’initiative « de la graine à la table ». Organisée par l’association Yelemani cette activité vise à lever toutes les zones d’ombres sur la semence paysanne  puis à promouvoir la semence paysanne grâce à des expositions et la vente de semences. Un concours sur la biodiversité des semences est également prévu.

Blandine Sankara, présidente de l’association Yelemani invite les Burkinabè à prendre part à l’initiative  » de la graine à l’assiette ».

Blandine Sankara, présidente de l’association Yelemani,  l’initiative « De la graine à la table » s’est tenue l’année dernière en 2024. Cet évènement vise à valoriser les semences paysannes depuis leur production jusqu’à la préparation de plats issus de différentes spéculations de ces semences. Elle indique que lors de l’édition 2024, une banque communautaire de semences paysannes a été inaugurée sur le site agroécologique de Yelemani à Loumbila.

La conservation des semences : une spécificité des agriculteurs africains

Aux côtés de l’Association Yelemani, la Coalition pour la Protection du Patrimoine Génétique Africain (COPAGEN) représenté par Ali Tapsoba dénonce monopolisation de la semence paysanne par les industries semencières. « De nos jours, quatre grandes entreprises agrochimiques dominent désormais le marché mondial des semences et des pesticides, exerçant un contrôle sur la production, la distribution et les prix des semences forçant les agriculteurs à acheter des semences hybrides chaque année », indique Ali Tapsoba.

Dans son allocution, le membre de la  COPAGEN révèle plusieurs difficultés liées à la production et à l’utilisation de la semence conventionnelle. Il cite notamment la réduction de la diversité semencière, remplacée par l’uniformité, ce qui se traduit par la perte de la majorité de nos variétés traditionnelles et favorise la diffusion de pathogènes, l’uniformité des variétés et l’utilisation de produits toxiques appauvrissent les sols, polluant ainsi les nappes phréatiques et augmentent la vulnérabilité face aux changements climatiques. Il ajoute aussi que les semences hybrides aggravent les conditions socio-économiques des paysans, car ils ne peuvent pas les réutiliser et doivent les acheter à chaque cycle, ce qui les rend dépendants des intrants coûteux. Tout cela entraine selon lui l’endettement et à la perte des savoir-faire du paysan.

Ali Tapsoba
Ali Tapsoba , membre de la COPAGEN veut que l’environnement burakinbé ne soit pas pollué par les semences conventionnelles mettant en mal les semences paysannes

Pour changer la donne, Ali Taspsoba souligne que plusieurs structures luttent pour empêcher la disparition de la semence paysanne. C’est d’ailleurs la raison principale de l’initiative « de la graine à la table ». Pour lui, de telles initiatives devraient être multipliées pour préserver et promouvoir la semence paysanne.

A cette conférence de presse, Lucien Silga, président de la commission juridique du Comité Ouest Africain des Semences Paysannes Burkina (COASP)/Burkina s’est prononcé. Il salue l’adoption de la loi 20-2019/AN portant accès aux ressources phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture et au partage des avantages résultant de leur utilisation les droits des agriculteurs de produire et d’utiliser librement leurs semences sont reconnus. Cependant, il dénonce la non application de cette loi. Pour lui, elle est encore au stade « théorique ».

Pour lui, deux systèmes semenciers coexistent en Afrique de l’Ouest dont le système formel ou industriel et le système paysan. « Le premier est dominé par des firmes semencières et des instituts de recherche, tandis que le système au niveau des paysans est principalement géré par eux-mêmes » a-t-il signifié. Il déplore aussi le manque de politiques de promotion des semences paysannes alors qu’environ 80 % des semences utilisées au Burkina Faso sont d’origines paysannes, selon ses propos.

Lucien Silga
 » Si la souveraineté alimentaire n’est pas assurée, il faut oublier la souveraineté politique » Lucien Silga

Sur ces chiffres largement dominés par l’utilisation des variétés paysannes, un journaliste a voulu savoir pourquoi donc s’inquiéter si les agriculteurs Burkinabè utilisent encore 80% des semences paysannes. A cette question, il répond que c’est par mesure de prudence. « La situation est critique à cause des semences améliorées et génétiquement modifiées (cas du niébé BT en station de recherche), du fait qu’au niveau international, des forces économiques libérales poussent à la mise en place de politiques semencières qui favorisent les multinationales de l’agrobusiness. Cela entraîne une harmonisation des normes et un contrôle croissant des semences », a-t-il défendu.

A noter que l’Association Yelemani pour la Promotion de la Souveraineté Alimentaire est engagée depuis 2012 dans la commune rurale de Loumbila dans les domaines de l’agroécologie et de la souveraineté alimentaire à travers  la production maraîchère agroécologique.